Stéphane Magron, Atelier d'ecriture radiophonique, Professeur Roger Simons
Le bois
texte de fiction destiné à être lu et joué pour la radio
Il est passé minuit. Il fait noir, totalement noir. Aujourd'hui
est une nuit sans lune.
Un homme dans sa voiture est poursuivi par un fou
meurtrier.
Pourquoi ? Nul ne le sait.
Notre homme arrive à l'orée d'un bois, hâtivement succédé du second. Il pleut
et ses essuie-glaces ont été volés il y a deux jours. Il distingue mal le chemin
bourbeux qui s'enfonce dans la forêt, car il ne possède, pour seul éclairage,
qu'une malheureuse veilleuse. Il est obligé de ralentir, de se laisser rattraper
de temps en temps, sinon c'est l'accident. Un coup d'Ïil dans le rétroviseur,
plus rien. L'autre ne le suit plus. Il freine sec et tourne dans un sentier. Il
coupe tout : feu et moteur.
Il souffle enfin. Pourquoi l'autre a-t-il
abandonné ? La sueur de la peur commence à le refroidir. Et pas de chauffage
en état de marche. Il grelotte. Ses extrémités se glacent. Ses dents claquent.
Il n'est que frissons.
La couverture ! Dans le coffre !
Il prend
ses clés, sort, ouvre le coffre, ferme le coffre, tout cela sans bruit,
s'installe de nouveau au volant, sous sa couverture. Pressé de s'en envelopper,
il laisse choir ses clés sous un siège. Peu importe ! , il les cherchera
plus tard. Pour l'instant, il souffle. Il est sauvé. Il commence à se
réchauffer. Le pire est passé. Il ne reste plus qu'à attendre un peu, que le
calme revienne, que son cÏur ralentisse.
Soudain, des phares percent le
feuillage au bout du sentier, devant lui. Puis, plus rien. De nouveau le noir.
Sa respiration s'accélère. Il panique. C'est lui ! , l'autre. Ses clés.
Il faut absolument les retrouver et fuir à reculons ! Mais il fait
toujours aussi noir, il ne distingue aucune forme. Sa main parcourt
frénétiquement le sol de la voiture. Une, deux, trois fois. Une quatrième fois.
Rien, toujours rien.
Tout à coup un choc. C'est l'autre ! Pare-chocs
contre pare-chocs, les deux voitures se font face.
Il cherche encore. C'est
son seul salut. Si seulement il avait une lampe de poche, dans la boîte à gants.
Mais rien. Il cherche une dernière fois, sans espoir, dans le noir, sans lumière
et sans bruit. Ce silence le tue.
L'autre est là ! Derrière sa porte, il le
sent.
La porte est forcée, elle résiste mal. Elle cède !!!
Lorsque la police vient sur les lieux, l'ampoule du plafonnier illumine ce
qui reste du pauvre homme : la gorge béante, coagulée, les yeux révulsés,
dirigés vers l'ampoule.
Pourquoi ? Nul ne le sait.
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