Martine MICHEL, Atelier de Théâtre - 2ème année, Professeur Jacques Monceu


Sur les chemins de Katmandou

Comédie en 1 acte




Décor



Un rez-de-chaussée meublé de façon cossue.


Sur le mur, côté jardin en avant plan, un petit meuble bar avec des bouteilles de whisky.

 

Et en arrière plan, une porte donnant sur la cuisine.

 

Fond de scène une porte donnant sur l’extérieur, et le portrait imberbe d’un aïeul (en habit de maréchal d’empire) ressemblant (plus ou moins) au comédien qui joue le rôle du plombier.


Sur le mur, côté cour. Une porte donnant vers les chambres.

 

En avant scène, un canapé flanqué d’une table basse.

 

Sur la table un téléphone.

 

              

                      

Acte 1

 

 

Cassandre de La Pétaudière, très femme du monde, arrive sur scène par la porte côté jardin (cuisine). Elle a un petit mouchoir en dentelle à la main, Elle est visiblement très agitée.


CDLP

Mon dieu, mon dieu, pourquoi faut-il que cela m’arrive à moi …..et aujourd’hui !

 

Elle se précipite sur le bottin et cherche un numéro.


CDLP

Lux cuisine, Lux cuisine…. Ah voilà.

Elle compose le numéro.


Voix off (dame)

Lux cuisine, bonjour, Sandy à votre service.


CDLP

Bonjour,  Cassandre-Marie Wintsor-de la Pétaudière, voilà ce qui m’amène. Sur les conseils de mon amie Hélène Fouchard, l’épouse du député, nous nous sommes adressé à votre société pour venir renouveler notre espace cuisine. Les travaux se sont achevés, il y a de celà, deux jours. Et aujourd’hui, ma cuisine est sous eau ! Ma bonne n’arrête pas d’éponger et  je vous avoue que je suis très très mécontente de vos services.  Pouvez vous m’envoyer quelqu’un d’urgence ?


Voix off (dame)

Mon dieu, madame, vous tombez mal, depuis ce matin notre usine est en grève !

 

CDLP

Mais enfin madame, je ne peux décemment pas rester dans de telles conditions ! c’est inenvisageable. Qu’il y ait une grève soit, mais trouvez- moi de l’aide!

Ce soir nous devions célébrer les fiançailles de mon fils, j’ai du tout annuler ! Il suffit ! Je refuse de voir mon splendide parquet Louis XV périr sous 30 cm d’eau !  Si vos ouvriers font grève, mettez- moi en communication avec un directeur.

 

Voix off (dame)

Je vais essayer de vous passer quelqu’un, voulez-vous patienter ?

 

CDLP (En aparté)

Une grève !  Décidément, rien ne me sera épargné !

 

Voix off (homme)

Lux-cuisine, bonjour en quoi puis-je vous être utile ?


 CDLP

Ah, enfin un responsable !

Votre société est venue, il y a deux jours, remplacer notre espace cuisine et aujourd’hui, l’eau coule de partout ! J’ai dû annuler le repas de fiançailles de mon fils. C’est une véritable catastrophe !  Que comptez vous faire ?

 

Voix off (homme)

Madame , avez-vous pensé à couper l’arrivée d’eau ?

 

CDLP

Mais, mon cher monsieur, si je savais où cela se trouve, je ne serais pas aussi affolée !


Voix off (homme)

Je vois, donnez-moi vos coordonnées, je vous envoie immédiatement spécialiste technico-sanitaire.


CDLP

Parfait.

Cassandre- Marie Wintsor-de la Pétaudière

Rue de la charmille

À Lasnes.

 

Voix off (homme un peu interloqué, gêné, surpris)

de la Pétaudière ? … Vous êtes de la famille de Clémence de la Pétaudière ?

 

CDLP

Clémence ; était ma mère, mais elle est décédée, il y a deux ans, Cela a-t-il une quelconque importance ?

 

Voix off (homme un ton un peu plus grave).

Non, simplement parmi nos clients, nous avions l’honneur de compter Mr et Mme de la Pétaudière. Je vous envoie immédiatement notre technicien.

 

CDLP

Bien merci, je vous attends !


CDLP s’assied nerveusement dans le canapé et lisse plusieurs fois sa jupe.

Oh mon dieu !  Quelle horrible journée ! Tous mes espoirs s’effondrent ; Hier, j’espérais marier, mon fils, à la fille de ma meilleur amie, aujourd’hui je dois annuler le dîner !

Pour vu que la petite, Marie Dominique, ne m’en tienne pas rigueur ! Ce serait un comble !

Un si beau mariage, ….

Une si belle dote ….

Une belle famille si riche !

….Mon tout petit serait enfin à l’abri !

 

Enervée, regardant sa montre.

- Il arrive bientôt ce technicien !

 

Elle se dirige vers la cuisine et apostrophe la bonne :

 

- Emérence, ma fille, où en sommes nous ?

 

 La bonne

J’éponge madame, j’éponge !


CDLP

Pendant combien de temps tiendrons nous encore ?


 La bonne

Je n’sais pas Madame !

Le réparateur, il arrive quand ?

 

CDLP

Sous peu, ma fille, sous peu ! Tenez bon !

 

Elle referme la porte

La sonnerie de la porte se fait entendre.

 

CDLP met de l’ordre dans sa tenue, et se compose un personnage calme,

posé, digne avant d’ouvrir.


CDLP

William ! Mon chéri.  Quelle bonne surprise !

Mais tu arrives en plein drame !

 

Ne laissant pas à son interlocuteur le temps de placer un mot….

 

Tu sais que j’ai fait placer un nouvel espace cuisine, le même style qu’Hélène Fouchard, tu sais la femme du député, mais en mieux, plus classe parce que entre nous soit dit, Hélène, la pauvre n’a pas le moindre goût en matière de décoration.

Les travaux se sont terminés mercredi et aujourd’hui, Ca déborde de partout ! De l’eau, de l’eau !

C’est une véritable catastrophe.

Emérence éponge de son mieux, mais j’ai dû annuler, le dîner de ce soir !

Tu te rends compte ! Ton dîner de fiançailles !


William

Se met à rire.


CDLP

Mais cela te fait rire !

Sang du Christ !

Mais que suis-je pour toi, un ophicléide ?

Je suis ta mère, je te le rappelle ! Et j’exige ton respect.

Sache que je me suis donné beaucoup de mal pour organiser ce repas.

Pour officialiser, enfin, ta relation avec Marie Dominique.

Trois ans que j’espère de pouvoir enfin annoncer ton engagement !

Trois ans que je rêve d’annoncer à mes amies que mon fils rentre dans la banque !

Elle sanglote.

Et maintenant, mon dîner est fichu à cause de cette…fuite de malheur !

J’ai dû décommander tout le monde, les amis, les relations de ton père, le député Fouchard, le traiteur, ça va nous coûter une fortune !

Et mon fils, lui, il rit…

Ah, saignez-vous aux quatre veines pour vos enfants, voilà comment il vous en remercie !


William

Voyons mère, ne vous mettez pas dans des états pareils, pour un dîner manqué !


CDLP

Mais qui te parle d’un dîner manqué ! C’est tout ton avenir qui risque de s’écrouler ! On ne retrouve pas si facilement : une belle fille aussi charmante, une future belle mère avec qui je m’entende aussi bien !

Et … une belle famille aussi riche !


William

Dame ! Ce n’est pas bien compliqué, de vous entendre avec la belle famille, Bérénice est votre meilleure amie ! Et vous avec connu Marie-Do toute petite.


CDLP

Il est vrai que Bérénice est ma meilleure amie.

C’est une raison supplémentaire de se réjouir de vos fiançailles !

Au moins nous connaissons la famille !

Mais je papote, je papote….

Et je ne t’ai même pas demandé de tes nouvelles.

Comment vas-tu mon chéri ?


William

Mère, vous me voyez vraiment confus de vous annoncer cela un tel jour….

Mais, cela fait longtemps que j’y pense. . Cette éternelle course au profit, cette consommation effrénée, ce struggle for life, cette vie de dingue, je n’en peux plus !

 

CDLP

Tu n’en peu plus ? Tu es peut-être fatigué, prends quelques jours de vacances. Cela fait trois ans que tu n’es pas parti, c’est bien normal.

Tu es le meilleur agent de change de la banque !

Lorsque vous serez mariés Marie Dominique et toi, tu reprendras la direction des affaires de son père ! Et les choses se calmeront.

Mon chéri, c’est une voie royale qui t’est offerte !

Tu ne vas tout de même pas me faire un caprice !

Pas maintenant !


William

Ce n’est pas un caprice mère, j’en ai marre ! J’ai décidé de mettre un terme à cette vie artificielle, basée uniquement sur le fric.

 

CDLP interrompant son fils.

Tu ne vas pas attenter à ta vie, tout de même ?

 

William

Non, mère, rassurez-vous ! Ce n’est pas dans mes intentions. Je souhaite simplement trouver un sens à celle-ci. 

J’ai donc décidé de vendre tout mes biens et de me retirer hors du monde, dans la paix et la prière. Demain, je prends l’avion et je me rends dans la lamaserie  de…..

 

CDLP abasourdie par la nouvelle est dans une sorte d’état second, comme si elle revivait la scène une deuxième fois.

Yamala au Tibet, je sais …


William

Comment pouvez vous savoir cela !

 

CDLP

Il y a longtemps, très longtemps, Hadrien, mon frère bien aimé, m’a déjà tenu ce même discours !

J’étais jeune, j’avais ! 16 ans, il en avait  27 ;

Lorsqu’il a annoncé cela à mes parents, la dispute fut, … terrible.

Et je n’ai plus jamais revu, mon frère….

 

William

Mais tu nous as toujours dit qu’oncle Hadrien avait fait fortune, dans un projet immobilier à Saint Bart et qu’il vivait heureux sous le soleil des Caraïbes !

 

CDLP un peu rageuse

Oui, c’est vrai, j’ai menti !

Mais enfin, il était tout de même plus glorieux d’avoir un frère riche à Saint-Bart, que de raconter que dans l’enthousiasme de mai 68, son frère a préféré quitter sa famille pour des moines bouddhistes !


William

Mais alors, je vais peut-être rencontrer Oncle Hadrien !

Ce serait super !

 

CDLP pincée

En effet, ce serait super !

Et par la même occasion, vous pourrez aussi le remercier pour vous avoir généreusement transmis ses gènes bouddhiques !

 

William

Oh mère ! Ne le prenez pas comme cela !

 

CDLP

Et comment dois je le prendre à ton avis ?

J’ai peiné sang et eau pour que tu puisses suivre de bonnes études, le collège St Michel, l’université, les business class à Harvard, à Yale,.

Trois ans que je m’échine à concrétiser un mariage entre Marie Dominique et toi.

Hier, j’annonçais fièrement à toutes mes amies que mon fils allait se fiancer avec la fille du banquier Baegelmakkers. Et tu voudrais que demain la bouche en cœur je leur dise , … William a changé d’avis il veut devenir moine bouddhiste !

Mais je vais être la risée de mon club de bridge !

Je te défends de partir, tu entends ! Je te le défends.

 

William

Voyons mère j’ai trente deux ans !

Je n’en suis plus à l’âge où vous me fessiez pour me faire obéir.

Ma décision est irrévocable, je quitte le territoire belge demain matin.


CDLP

Mais ce n’est pas possible ! tu veux ma mort, c’est ça ?

Et Marie Dominique que pense-t-elle de cette nouvelle lubie ?

 

William

Marie-Do et moi, sommes d’accord, ne vous inquiétez pas.


CDLP s’écroulant dans le canapé

Alors ça, c’est le bouquet ! Vous êtes d’accord !

D’accord pourquoi ? Pour vous séparer ? Pour vous marier après ta crise de mysticisme?


William

Je n’en sais rien, Mère.

C’est le pourquoi de mon départ.

Désolé de vous causer ce chagrin.


CDLP

Mais dis-moi au moins ; quand as décidé de nous revenir ?

 

William

Je commence par une retraite de trois mois, après je verrais …

Au revoir, mère.

Vous embrasserez père pour moi.

 

CDLP

Adieu mon tout petit, prends bien soin de toi.

 

Elle reconduit son fils jusqu’à la porte.

Elle referme la porte, puis, par la fenêtre, elle regarde partir son fils.     

Avant de regagner sa place sur le canapé elle s’arrête devant le portait de son ancêtre et se met à lui parler. 


CDLP

Ah Maréchal ! Cher ancêtre, ce n’est pas à votre époque que les enfants se seraient permis cela.

Aujourd’hui !  Que de tracas !

  

Elle se dirige vers la cuisine et ouvre la porte

 

CDLP

Emérence ?

 

La bonne

Oui Madame ?

 

CDLP

Les choses s’arrangent-elles ?


La bonne

Hélas, non madame.

 

CDLP

 

Et se spécialiste qui n’arrive toujours pas !  

 

La sonnerie de la porte se fait entendre.

Ah. Nous sommes peut-être sauvés !

 

Elle s’en va ouvrir la porte.

Devant elle, un immense plombier en bleu de travail, il est doté d’une grosse barbe qui lui mange une bonne partie du visage.

 

Gustaaf

Bonjour Madame, je viens de la part de Lux cuisine.

 

CDLP

Entrez Monsieur, on peut dire que vous êtes attendu avec impatience !

 

Gustaaf tend la main à CDLP

 

Gustaaf

Je me présente, Gustaaf Dewit, plombier. Avec Dewit, adieu les fuites ! C’est ma devise!


CDLP

Ah c’est cela que l'on appelle un spécialiste technico sanitaire ?  Enfin !


Gustaaf

Ben, oui hein madameke, c’est la nouvelle mode ! Une nettoyeuse c’est une technicienne de surface et un plombier c’est  un spécialiste technico- sanitaire. C’est la même chose, mais ça fait plus chic !


CDLP

Bien, je vais vous conduire à la cuisine.

 

CDLP s’en retourne vers son canapé où elle s’assied pour lire nerveusement une revue de mode.

 

Un bruit de clef se fait entendre.

Entrée d’Archibald Wintsor, le mari de CDLP.  Grand, très british, costume 3 pièces, porte-documents à la main, Le Times sous le bras.


Archi

Bonjour, Darling, avez-vous passez une bonne journée ?

 

Il se sert un whisky et va lire son Times dans le fauteuil.

 

CDLP

Puisque vous me le demandez si galamment.

Non ! je n’ai pas passé une bonne journée !

Depuis ce midi, notre nouvelle cuisine est sous eau ! Et la société qui nous l’a placée est en grève ! En grève vous vous rendez compte !  On devrait supprimer ce droit aux ouvriers. Comment osent-ils se plaindre !  ils ont du travail et ils gagnent bien leur vie!  Combien gagnent-ils au fait ? trois mille quatre mille Euros, c’est peu d’accord, mais on doit pouvoir s’en sortir, que diable. Leurs loyers sont moins chers que les nôtres et leur nourriture, très différente. Je suppose qu’ils ne prennent pas régulièrement de caviar ! C’est tout de même une belle économie, n’est ce pas Archi ?

Archi je vous parle !

 

Archi

Le, le prix du caviar, aujourd’hui ?

Hem, cela doit faire deux cents, trois cents Euros le kilo ?

 

CDLP hurlant

Mais je ne vous parle pas du prix du caviar !

 

Arrivée de Monsieur Gustaaf.

Il astique une énorme clef anglaise.

 

Gustaaf

Madame m’a appelé ?

 

CDLP gracieuse

Non, monsieur Dewit. Pourquoi ?

 

Gustaaf ironique

J’avais cru entendre quelqu’un crier.

 

CDLP

Mais nous ne criions pas, monsieur Dewit, nous discutions simplement mon mari et moi !


Gustaaf

Si vous le dites madameke.

 

Apercevant Archibald derrière son journal.

 

-Ah ! Mais monsieur est aussi là.

Il s’essuie les mains à sa salopette et en serrant énergiquement la main d’Archi, il se présente.

 

-Gustaaf, Gustaaf Dewit plombier. Ouais, maintenant on dit spécialiste technico-sanitaire, ça fait plus chic, mais moi je préfère plombier.

Et ma devise c’est avec Dewit, adieu les fuites ! c’est bien hein ! Ça sonne bien ! C’est de moi.

 

Archi

Effectivement, c’est très percutant votre slogan, félicitations !

 

CDLP suave

Alors mon bon monsieur Dewit, que me racontez vous ? Où en sommes nous avec nos fuites ?

 

Gustaaf s’approchant du bar et regardant les bouteilles avec envie

-Ça va madame, ça va mieux.

 

Il sort de sa poche un énorme mouchoir à pois rouge et blanc et se mouche bruyamment.

- Ça coule plus, mais (toussotant) les travaux, ça donne beaucoup de poussière évidemment ! Et les poussières ça gratte la gorge.

Comme CDLP fait mine de ne rien comprendre.

-Bon, ben alors, je vais continuez, alors.

Il sort. Puis, passant la tête par la porte de la cuisine.

-Dites si vous voulez encore discuter, ne vous gênez pas pour moi !

 

Archibald, le verre de whisky à la main replonge dans son Times.

 

Enervée, CDLP se plante devant son mari.


Archi

Vous désirez darling. ?


CLDP

Je souhaitais vous parler de votre fils !


Archi

De notre fils, si je ne m’abuse.


CDLP

Si vous préférez.


Archi

Je ne le préfère pas, darling,  je l’espère, tout simplement.

Que disiez vous à propos de William ?


CDLP

Vous connaissez sa dernière lubie ?

Il refuse de se marier avec Marie Dominique !

Pire, il veut quitter la maison !


Archi

Tous les jeunes gens quittent un jour ou l’autre leur famille, ma chère.; William a 32 ans, c’est dans l’ordre des choses. Il n’y a vraiment pas de quoi vous mettre dans un tel état!

 

CDLP

Mais il ne veut pas son indépendance, il veut devenir moine !


Archi

Moine !

Oui, à la réflexion c’est un peu curieux comme idée.

Dans notre famille nous avons déjà eu de nombreux prêtres et chanoines, 6 évêques, nous avons même failli avoir un pape… mais nous n’avons jamais eu de moine tibétain.

 

CDLP

Et bien tant mieux pour votre illustre famille !

Vous allez inaugurer une nouvelle ère ! Vous serez l’heureux papa d’une sorte d’erzatz de dalaï-lama !

 

 Archi

Je vous trouve bien sévère, chère amie ! Le bouddhisme est une philosophie éminemment respectable. Et pour autant qu’il m’en souvienne, vous n’aviez pas un frère qui dans les années soixante s’est retiré dans un monastère tibétain ?

 

CDLP

Oui effectivement. Je te remercie de me remettre en mémoire d’aussi bons souvenirs !

Mon frère Hadrien s’est retiré dans le même monastère, il y a quarante ans de cela.

Et n’allez pas y voir une quelconque tare familiale !

 

Archi

À propos, qu’est-il devenu ?

 

CDLP

Qui ?

 

 ARCHI

Votre frère, Hadrien !


CDLP

Je ne sais pas, lorsqu’il a annoncé sa décision, papa a pris un coup de sang.

Il a piqué une colère terrible, grand père et lui, espéraient tellement qu’Hadrien reprenne la société ! Ils se sont dit des choses terribles, ça criait de partout, finalement mon frère a claqué la porte et je ne l’ai plus jamais revu.

La porte de la cuisine s’ouvre, apparaît Monsieur Gustaaf qui poli toujours son énorme clef anglaise.


Gustaaf

Je dérange pas ? Voilà, j’ai resserré les écrous, j’ai mis mon mastic, maintenant il faut que ça sèche !

 

Archi

Venez, cher Gustaaf, vous arrivez à point. Nous allions prendre un verre à la santé de notre fils !

 

CDLP

Oh, alors là, c’est d’un goût !

 

Archi prépare deux énormes whiskys et un plus petit.


Gustaaf

Ah ! Votre fils va se marier !

 

 Archi

Et bien non ! Changement de programme !  Notre fils se tourne vers la religion.

Mais asseyez-vous.

 

Gustaaf

Ah, il veut devenir prêtre ?

 

Archi

Non, moine !

 

Gustaaf (curieusement intéressé)

Moine ?


Archi

Oui, il souhaite se retirer dans un ashram au Thibet à….


 Gustaaf

Yamala !

 

Archi et CDLP (étonnés).Oui. Vous Connaissez ?

 

Gustaaf (un peu embarrassé /hésitant : troublé)

C'est-à-dire que ….Y a le gamin d’une cliente qui est aussi parti là-bas !! Ce doit être à la mode !

Changeant visiblement de sujet.

-Dites, il est fameux votre whisky !

 

Archi

Oui, il me vient directement d’Ecosse, de notre petite distillerie familiale.


CDLP amère

Tu veux dire de la grande distillerie dont ton noceur de père a péniblement sauvé quelques parts !

La Morgan, Mac Cullen, Cheney… et Wintsor.


Archi

Oui, il est vrai que mes parents ont eu quelques revers de fortune. Mais contrairement à monsieur votre père, ils n’ont pas tout investit dans des inventions douteuses !


CDLP

Des inventions douteuses ! Mais c’est totalement faux. Papa n’a pas eu de chance voilà tout !

 

Archi

Pas de chance ! Que voilà un doux euphémisme chère amie !

Première invention, une sorte de car wash pour escargots de Bourgogne .  À la première démonstration, il a électrocuté toutes ces pauvres petites bêtes.

Ensuite le fameux papillon auxiliaire de pollinisation. En fait, ce leurre en plastic était enduit d’une substance qui rendait les abeilles et les guêpes tellement agressives qu’aucun acheteur n’osait encore aller dans son jardin.

 

CDLP

C’est bien ce que je disais, papa n’a pas eu de chance et c’est ce qui a causé sa ruine.

 

 Gustaaf étrangement inquiet

Votre papa est ruiné ?


CDLP émue

Oui, il croyait tellement en ses projets, qu’il en avait déposé les brevets. Il a tout investi et tout perdu. Et puis, la disparition de mon frère, l’a totalement désespéré. Un dimanche, ma mère et moi, nous l’avons retrouvé, pendu dans le grenier.

Oh excusez-moi, je vais cherchez un mouchoir.

 

Archi

Vous permettez.

Galant, Archi raccompagne son épouse dans sa chambre.

Laissé, brièvement seul, monsieur Gustaaf jette un coup d’œil dans le carnet de téléphone.

 

 Retour d’ Archi

 

Gustaaf ému

Et ben dites donc. Elle n’a pas eu la vie facile votre épouse.

 

Archi

Vous avez raison, la vie n’a pas toujours été très douce pour Cassandre.  Nous nous sommes rencontrés peu après la mort de son père.

Elle a très mal vécu cette période. Le frère qu’elle aimait disparaît dans un ashram au Tibet, le grand père décède, son père se suicide !

Je pense que cela l’a marquée plus qu’elle ne veut le dire. J’ai parfois l’impression que son seul véritable refuge est devenu l’argent.

Et vous voyez Monsieur Gustaaf, je ne sais pas pourquoi je vous fais de telles confidences ; Mais, le plus dur est à venir, je dois encore lui avouer que bientôt nous serons ruinés.


Gustaaf  affligé

Oh non, ne dites pas cela. Il doit sûrement y avoir moyen de redresser la barre !


Archi

Non, personnellement, je suis de la vieille école, et complètement dépassé par toutes ces nouvelles technologies.

Faire du whisky à l’ancienne, oui, je m’en sens capable. Mais à grande échelle, alors là, non. Ce n’est pas pour moi.

Notre usine va être rachetée par une grosse boîte industrielle et sauf miracle, je vais me retrouver éjecté avec comme remerciement quelques dizaines d’actions.

 

Gustaaf se lève et vient consoler Archi


Gustaaf

Mon pauvre monsieur, si seulement je pouvais faire quelque chose pour vous !


Archi

Je ne sais pas pourquoi Gustaaf, mais vous me semblez éminemment sympathique. J’avoue que c’est la première fois que je me confie à quelqu’un. Vous me faites du bien, Gustaaf !


Gustaaf

Cela me fait plaisir ce que vous dites là monsieur Archibald.

Désolé de vous laisser, il faut bien que je répare la fuite.


Archibald est assis dans son fauteuil, il lit toujours son Times, lorsque Cassandre sort de la chambre.


Archi

Comment vous sentez-vous darling ?


CDLP

Un peu mieux, merci.

Tous ces souvenirs, toutes ces émotions ça m’a littéralement épuisé.

Un peu de repos m’a fait du bien.

Quelle sont les nouvelles du front ?

 

Archi

Et bien, les choses semblent se terminer. Monsieur Gustaaf a localisé la section de tuyau qui posait problème. La fuite est colmatée. Et il s’occupe maintenant de replacer le plafonnage.

 

CDLP

Parfait !

Il est sympa ce monsieur Gustaaf, tu ne trouves pas ?

Il a un je ne sais quoi qui inspire confiance.

 

Archi

Oui tu as raison, je viens de discuter avec lui comme si c’était un ami de longue date.

 

Sonnerie à la porte extérieure.

Cassandre se dirige vers la porte.

 

CDLP

Oh, William mon chéri, quelle joie, tu as changé d’avis ;

 

William

Mère, père vous ne devinerez jamais ce qui m’arrive !

 

CDLP

Mais raconte, mon chéri. Tu as l’air tout bouleversé.

 

William

Maman, papa, asseyez car la nouvelle est des plus étonnante.

Je préparais mes bagages lorsque mon portable m’a indiqué l’arrivée d’un message. Et devinez de qui émanait le message ?


CDLP

Oh William s’il te plaît, tu sais que j’ai horreur des devinettes !

 

William

Le message venait d’oncle Hadrien, il me demandait de le rejoindre ici.


CDLP

Un message d’Hadrien, mon frère !

Il est vivant !

Oh mon dieu ! Merci.


Archi

Pour quand annonce t’il sa visite ?

 

William.

Pour ce soir, mais je n’ai pas plus de précisions.


Arrivée de monsieur Gustaaf.


Gustaaf avec sa malette à outils

Oh excusez-moi , je dérange !

 

CDLP

Non cher monsieur Gustaaf, je suis tellement heureuse. Je viens d’apprendre que mon frère est vivant !

Archi, servez-nous un verre de votre réserve spéciale. Je vois que vous êtes sur le départ, mais vous ne refuserez pas de prendre un dernier rafraîchissement avec nous Monsieur Gustaaf ?


Archi

Excellente idée ! On vous sert quelque chose monsieur Gustaaf ?


Gustaaf

Allez oui, on ne refuse pas de trinquer au bonheur !,

 

Archi fait le service.

 

CDLP

Buvons à l’arrivée prochaine de mon cher frère !

Tout le monde trinque.

 

CDLP

Alors monsieur Gustaaf, où en est-on dans les travaux ?

 

Gustaaf

Cela se termine, Madameke. Vous serez bientôt débarrassés de moi !

 

CDLP

Ne dites pas cela monsieur Gustaaf, c’était un plaisir de vous avoir rencontré.

 

Gustaaf un peu gêné

Vous êtes vraiment trop gentille.

Dites monsieur Archibald, le premier Whisky que vous m’avez fait goûter, était bon, mais celui-ci ! Chapeau ! c’est quelque chose, hein.

 

Archi

Ah mais ça, c’est ma cuvée spéciale !

Faite à l’ancienne.

Ça n’a aucun rapport avec toutes ces fabrications industrielles que l’on propose de nos jours.

 

Gustaaf

Mais, monsieur Archibald, pourquoi ne pas commercialiser une pareille merveille. Vous emballez ça dans un joli flacon et puis, zou, l’affaire, est dans le sac ! Je suis certain que cela va se vendre comme des petits pains.

 

Archi

J’y ai déjà pensé, mais je n’ai pas les capitaux pour me lancer dans la fabrication.


Gustaaf

Mais vous pourriez prendre un associé !


Archi

Des associés j’en ai déjà trois, mais aucun ne souhaite se lancer dans la création de whisky haute gamme.  Le profit maximum, ça, oui , mais faire de la qualité, non ! Cela demande bien trop de travail !

 

Gustaaf

Je sais pas moi, j’ suis que plombier ! Mais si mes copains, ils veulent pas m’aider à faire quelque chose, je demande à d’autres.

Pourquoi  vous ne demandez pas à d’autres ?

 

Archi

Vous savez que votre idée n’est pas mauvaise du tout, elle est même très bonne ! Je n’ai jamais pensé à trouver d’autres associés, mais c’est une idée à creuser.

 

Dis donc William, il a dit quand il allait venir l’oncle Hadrien ?

 

William

Non, il n’a pas précisé d’heure.

 

Archi

Cassandre, très chère, ne pensez-vous pas que l’on pourrait improviser un petit souper pour votre frère Hadrien ?

 

CDLP

Monsieur Gustaaf, pensez-vous que l’on puisse se servir de la cuisine ?


Gustaaf

Oui, madameke à part quelques carrelages que je dois venir replacer dans quelques jours, tout le reste est en ordre.

 

Gustaaf terminant son verre

Bien bè, madame Cassandre, monsieur Archibald, je vais vous quitter, je repasserais dans quelques jours rapport aux  carrelages.

Et puis je vous souhaite le meilleur avec votre frère.

 

CDLP raccompagnant le plombier.

Au revoir, Monsieur Gustaaf,  à mardi .

 

Bien, moi je vais aider Emérence, à préparer le repas.

 

Sortie de Cassandre par la cuisine.

 

Le téléphone sonne.

 

William

C’est peut-être oncle Hadrien qui annonce l’heure de son arrivée.

 

Archi décrochant

Allo, Archibald Wintsor.

….

Oui, c’est exact.

….

Demain 10h, parfait j’y serai.

 

Il raccroche et reviens vers son fils.

 

William

Ce n’est pas une mauvaise nouvelle ?


 Archi

Alors là ! Je n’en reviens pas ;

J’ai rendez vous demain avec la société Partel, ils souhaitent lancer un whisky très haute gamme et ils demandent à me rencontrer !

Tu imagines ça !

Tout à l’heure, j’étais à deux doigts de la banqueroute et maintenant, je trouve un commanditaire pour mon whisky prestige. Incroyable c’est positivement incroyable.

Oh mon garçon, quelle joie !


William

Mais enfin père pourquoi ne m’avez-vous jamais parlé de vos difficultés financières ? J’aurais peut-être pu vous aider !

 

Archi

Je crois mon petit que j’avais démissionné. Et si ce monsieur Gustaaf ne m’avait pas gentiment secoué, je crois que j’aurais sombré corps et âme.

 

On sonne à la porte.

 

William

Avec un peu de chance, cette fois ce sera peut-être l’once Hadrien…

 

Archi va ouvrir la porte.


Archi

Monsieur Gustaaf , vous avez oublié quelque chose ?

 

Gustaaf

Oui, je peux entrer ?

 

Archi

Mais je vous en prie.

Archi se dirige vers la cuisine.


Archi

Cassandre Darling, voulez vous venir un instant, c’est Monsieur Gustaff.

 

Cassandre arrive.


CDLP

Et bien cher Monsieur Gustaaf, vous n’avez pas été bien long à nous revenir !

Ah je vois que vous vous êtes changé, vous savez que vous êtes très élégant en costume.

 

Gustaaf

Et bien voilà, Cassandre, Archibald, Williame, votre  oncle Hadrien, c’est moi.

 

CDLP

Comment, cela c’est vous ? C’est toi ?

Mais comment est-ce possible ?


Gustaaf/Hadrien

Cela fait plusieurs mois que je suis rentré en Belgique.

J’ai créé cette succursale afin de me rapprocher de ma famille.

Mais je ne savais pas comment reprendre contact.

Lorsque je t’ai eu au téléphone, j’ai trouvé que c’était une bonne façon, de te venir en aide, mais aussi de savoir si tu souhaitais me revoir.

 

CDLP Se jettant dans les bras de son frère

Gros bêta va, bien sûr que je souhaitais te revoir, cela fait quarante ans que je t’attends !

Mais raconte-moi, qu’as-tu fait pendant toutes ces années ?

 

Archi va à la cuisine et ramène le champagne.

 

William prépare les verres.

 

Cassandre s’assied près de son frère sur le canapé.


CDLP

- Alors raconte.

Pourquoi as-tu disparu si longtemps, sans même me donner de nouvelles ?


Hadrien

Depuis mes seize ans, je savais que grand père, avait décidé que je reprendrais sa société d’assurance. J’ai grandi dans cette idée, mais au plus l’échéance approchait, au plus je me sentais mal.  Le coup de grâce m’a été porté lorsque la famille Godillot avec ses 7 enfants a vu sa maison incendiée. L’assurance a refusé de rembourser les dégâts, sous le prétexte fallacieux que le père Godillot était en retard de paiement d’un mois. Le pauvre bougre avait tout perdu, il n’avait même pas un franc pour prendre un avocat. La compagnie jouait sur du velours.

Mais, moi cela me révoltait. Quand j’en parlais à grand père, cela le faisait rire, il me répondait que les affaires étaient les affaires, quant à papa perdu dans son monde d’inventions farfelues, il ne m’était d’aucun secours.

Je me suis pris à détester ce monde vénal, mais j’ai patienté. Tu étais si petite tu avais tellement besoin de ton grand frère. Lorsqu’à l’adolescence, tu m’as fait comprendre que tu étais assez grande pour vivre toute seule. J’ai pensé qu’il était temps pour moi donner vie à mes projets.

 Lorsque j’en ai parlé à la famille, la dispute fut d’une telle violence que j’ai claqué la porte à tout jamais.

Je suis parti dans un monastère au Tibet, j’y ai vécu 15 ans. Je me suis rendu utile, j’ai bâti des écoles, des hôpitaux.  Puis je suis parti pour la France, où j’ai ouvert une petite société de sanitaire. Les affaires sont devenues de plus en plus florissantes ; Lorsque j’ai ouvert cette succursale Belge, je me suis promis  de te retrouver et j’avoue que le hasard a bien les choses.

 

CDLP 

Oh Hadrien quelle joie ! J’ai l’impression que toute ma vie en est changée !    


Archi

C’est vrai Hadrien ! Vous êtes notre bonne étoile ! Il y a quelques minutes je viens d’avoir un coup de fil de la Societe Partel pour un projet d’association . Vous ne seriez pas derrière cette bonne nouvelle ?


Hadrien

Pas vraiment, J’ai simplement parlé de votre idée à un ami.

 

Archi

Vous avez un fameux réseau d’ami, cher Hadrien ! Je vous remercie pour

votre aide.

 

Hadrien

Oh Archi, je n’ai fait que vous donner un tout petit coup de pouce.


William

Mais oncle Hadrien pourquoi m’avez-vous contacté, moi ?

 

Hadrien

Parce que j’ai besoin de toi.  Lux-cuisine, les sanitaires tout cela n'est que la partie immergée de mes activités. Avec une partie de mes bénéfices, je construis des hôpitaux, des écoles dans les villages déshérités du Tibet.

Comme je songe à prendre ma retraite, j’ai pensé à toi pour ma succession. Qu’en penses-tu ?

 

 William

Oncle Hadrien ce serait formidable ! Arriver à allier les affaires et l’humanitaire, mais c’est mon rêve !

 

Hadrien

Tu sais William, il n’est pas toujours utile de s’expatrier au fin fond du monde pour réfléchir au sens de sa vie. On a parfois tout sous le nez, mais on ne le voit pas.

 

CDLP

Hadrien quel merveilleux cadeau tu nous fais là !


Hadrien

Ce n’est rien petite sœur, après tout ce que tu as vécu, je peux bien te gâter un petit peu, pour me faire pardonner !

 

 

CDLP

Allons trinquons à nos retrouvailles !

 

Tous ensemble

À Hadrien !

 

Williame

Mère, me permettez vous de téléphoner à Marie Do pour lui apprendre la bonne nouvelle ?


Tous ensemble

Oh oui !

 

 

                                               Rideau

 



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